
Himra embrase Brescia : d’un chaos annoncé à une nuit d’anthologie
Le concert était annoncé pour 22 heures. Une étape italienne dans une tournée européenne ambitieuse. Très vite, la salle se remplit. Les fans arrivent de partout : Bruxelles, Paris, Berlin, Milan. Mais les heures passent, sans le moindre son. À minuit, toujours rien. À 2h, l’agacement monte. À 3h30, certains quittent la salle. Pourtant, un noyau fidèle reste.
Derrière le rideau, un bras de fer. Selon plusieurs sources proches de l’équipe, Himra refuse de monter sur scène tant que la totalité de son cachet n’est pas réglée. Une question de principe plus que d’argent. « Ce n’est pas qu’un problème de contrat, c’est une question de respect », explique un membre de son entourage. « On ne peut plus demander aux artistes africains de livrer des shows impeccables dans des conditions bancales. »
Une posture de plus en plus fréquente parmi les têtes d’affiche des musiques urbaines africaines, qui refusent désormais les compromis flous. Et Himra, l’un des leaders de cette nouvelle génération, n’en déroge pas. Sa démarche choque certains, mais en inspire beaucoup.

Et puis, soudain, à 4h30, il entre en scène. En silence. Pas d’introduction, pas d’effet dramatique : juste une montée directe, le micro à la main. Et dès la première note, tout change. L’énergie, la rage maîtrisée, la précision des textes… Il transforme l’attente en intensité. Le show est brut, dense, incandescent. Chaque morceau est accueilli par une clameur, chaque mot semble peser plus lourd que la fatigue.
« C’était long, c’est vrai. Mais il a tout donné. Il nous a tout rendu », souffle une spectatrice ivoirienne, encore secouée, un drapeau tricolore noué autour des épaules.
Ce concert à Brescia n’était pas qu’un simple rendez-vous manqué rattrapé au dernier moment. C’était un manifeste. Celui d’un artiste africain qui impose sa vision, sa rigueur, sa voix. Himra n’est plus un espoir du rap francophone : il en est l’un des porte-étendards. Son exigence artistique, sa conscience des enjeux et sa capacité à galvaniser un public dans des conditions extrêmes en disent long sur la place qu’il occupe désormais.
Dans cette nuit confuse, il n’a pas seulement performé. Il a rappelé, sans discours, qu’un artiste peut refuser l’inacceptable, sans jamais trahir son public. Et parfois, c’est dans la tension que naissent les grandes légendes.