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Restrictions capillaires et crise identitaire

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Au Liberia, pays logé à l’Ouest de l’Afrique, les femmes du ministère des Finances n’ont plus le droit de porter des cheveux colorés. A l’issue d’une réunion tenue début octobre 2018 entre le ministre et les employées de cette administration, il a été convenu que les femmes ne se coiffent plus avec les extensions de couleurs telles que le rose, le bleu, le rouge, le jaune, le gris et le mauve, ou qu’elles ne teignent plus leurs cheveux en des couleurs jugées extravagantes. Cette interdiction courait depuis 2014. Les autorités ont simplement décidé de la mettre en application. Les contrevenantes sont soumises à des sanctions pécuniaires.

Au-delà du petit côté insolite qui force le sourire en coin, il y a une réflexion à mener sur la dimension sociale du cheveu de la femme. L’exemple du Liberia, qui s’est bien gardé de noter l’ampleur du phénomène, nous montre qu’il est bien plus fort qu’il en a l’air. Sa portée politique est, aujourd’hui, indéniable. Ces dix dernières années, par exemple, le cheveu crépu a mené une importante révolution et est devenu un puissant instrument politique. Contraignant même pour les cosmétiques, obligés de se conformer à la mouvance nappy. Le cheveu, sa nature, le message qu’il renvoie ou qu’on choisit de lui faire porter sont au centre de la question identitaire, jamais autant d’actualité qu’aujourd’hui. Le crépu pour exister. Le crépu pour s’affirmer.

Seulement, contrairement à l’exemple du Liberia, la prise de conscience s’est faite d’elle-même. Il n’y a pas eu de coupes salariales ou d’interdits. Le monde s’est réveillé un beau matin et a réalisé qu’il se passait quelque chose de fort, sur la base d’un élément en partage : le cheveu crépu, propre aux peaux noires, trop longtemps caché, trop longtemps détesté. Symbole d’une révolte sociale, le cheveu crépu se démêle aujourd’hui et étend ses tentacules sur divers domaines.

Sous d’autres cieux soumis à des cultures différentes, couvrir ses cheveux est un acte décent, renvoie l’image de la femme vertueuse, respectueuse des valeurs sociales édictées par des hommes. La soumission par le cheveu n’est finalement pas un fait nouveau (ce n’est qu’une interprétation).

 

Le parallèle est vite fait avec le modèle libérien. Celui-ci a l’avantage de pousser les femmes à s’accepter mais, sont-elles leurs cheveux ? La problématique est beaucoup plus profonde. Elle va bien au-delà de l’esthétique que l’on tente tant bien que mal d’encadrer. Pourquoi ont-elles besoin de se sentir belles en portant d’autres couleurs ? Où se situent-elles dans leur identité. Quels modèles de beauté leur renvoie-t-on au quotidien ? N’est-il pas temps de construire un discours contextualisé  sur l’esthétique ?  Pour finir, ne sont-elles pas libres de disposer de leurs cheveux ?

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