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Cathérine Ruelle : « j’ai ressenti le besoin de m’engager plus encore aux côtés des cinéastes et pas seulement de diffuser leur parole »

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Parallèlement à ses fonctions de critique et à la publication d’ouvrages et d’articles, Cathérine Ruelle à mis en place des manifestations cinématographiques, festivals et ciné-clubs permanents. Dans la suite de cette série d’interviews réalisés avec la rédaction de tendancespeoplemag.com, vous apporter des éclairages.

Quels sont les souvenirs positifs que vous gardez du cumul de vos expériences professionnelles liées à l’Afrique ? Il y a quelques années, en 2012 vous avez quitté RFI après 40 ans de carrière notamment à travers l’émission  » Cinéma d’aujourd’hui, cinéma sans frontières « . Quel bilan pouvez-vous en faire ?

Chaque émission que nous faisions avec une toute petite équipe, était comme une fenêtre ouverte sur la création, un lien hebdomadaire entre les cinéastes et leur public, mais aussi entre les cinéastes eux-mêmes. Il faut dire que nous avions une liberté totale, et des moyens conséquents qui nous permettaient de nous déplacer sur le terrain et de « couvrir » en direct les grands festivals de Cannes à Ouaga. Les contacts sur le terrain étaient alors l’occasion de fouiller plus encore les réalités des pays dans lesquels nous nous déplacions et de mettre en exergue l’influence du cinéma sur l’évolution des idées, car les cinéastes étaient en première ligne, des intellectuels engagés dans le développement de leur pays.

Porter et amplifier leur parole était donc très important dans ces années où la radio était le média le plus important et où il n’y avait pas encore les réseaux sociaux et les plateformes internet. Nos émissions étaient constituées de reportages, de débats souvent passionnés, d’interviews portraits, de critiques de films et très illustrées d’extraits.

L’émission était devenue un rendez vous incontournable, du fait de sa longévité aussi ! Plus de 40 ans au service du cinéma !
D’ailleurs sur le terrain, jai souvent vécu des situations extrêmement émouvantes, comme par exemple à Madagascar où j’assistais au festival du court métrage organisé par le cinéaste Laza, et où plusieurs personnes m’ont arrêtée dans la rue, car elles avaient reconnu ma voix ! Ou encore au Fespaco où un important public suivait avec enthousiasme nos émissions en direct…

Au cours de ces 40 années, chaque rencontre en fait, m’a énormément apportée et au fil des émissions, des films et des interviews. J’ai ressenti le besoin de m’engager plus encore aux côtés des cinéastes, et pas seulement de diffuser leur parole.
Grâce au soutien de RFI et de ses directions successives (un média formidable écouté par 45 millions de personnes à travers le monde), j’ai pu mettre sur pied, ce qui serait totalement impossible aujourd’hui, des festivals de cinéma à la Fnac (Black American Independent cinéma-1980), au centre Pompidou (Racines, Hommage au Fespaco – 1985), au Forum des images, (Racines, rencontre des cinémas du monde noir 1998-2002), un ciné-club permanent au musée Dapper (2000-2012) des tournées de films (Ciné-Contes) avec le conteur sénégalais Makéna Diop, dans toute l’Europe, aux Antilles et en Afrique. Des prix aussi, j’en ai reçu comme le Prix Djibril Diop Mambety remis au festival de Cannes pendant plusieurs années dans le cadre de la Semaine de la critique et des publications dont des « passeports » de vulgarisation des cinémas dAfrique, des livres avec Guy Hennebelle et le Fespaco, des collections dvd avec Arte…

Catherine Ruelle, on rappelle que vous êtes auteure de plusieurs ouvrages sur les cinémas d’Afrique. Pensez-vous que leur contenu a permis d’aboutir à des impacts concrets sur les mutations du cinéma africain ?
En tout cas, ces publications, livres ou collections DVD ont l’avantage d’exister depuis la fin des années 70.
Je dois beaucoup au critique Guy Hennebelle, décédé en 2003 qui avait créé dans les années 70, la formidable collection CINEMACTION qui permet depuis lors de découvrir les cinémas des trois continents, et dans lesquels les plus grands cinéastes, les critiques les plus fins ont écrit. Des collections qui préfiguraient et ont sans doute ouvert la porte aux revues cinématographiques d’aujourd’hui. Après son ouvrage très complet de 1972, nous avons écrit ensemble le premier numéro de cette revue consacrée aux cinémas d’Afrique en 1978.

Alors parler d’impact de ces livres sur les mutations du cinéma africain, ce serait bien présomptueux, mais la découverte des cinéastes du continent, l’analyse des œuvres, la diffusion de la parole des créateurs et de leurs images, la facilitation des rencontres entre les uns et les autres, l’appui à la formation des critiques de cinéma, a sans doute permis à de nombreux historiens et étudiants de cinéma de découvrir leur patrimoine et peut-être à des cinéastes de naître. Je me souviens que lors du festival Black Independent Cinéma en 1980, il y avait dans la salle, de jeunes étudiants africains, comme Cheikh Oumar Sissoko …

Quelquefois des étudiants ou de jeunes cinéastes viennent me voir au cours d’un débat, et me montrent comme une relique, ce livre écrit en 1978, livre souvent feuilleté et écorné mais qui leur a permis de partager notre passion !

Propos recueillis par Georgine Motassi

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